En octobre 2024, le ministre Tchin Darre accordait un délai de six mois à tous les établissements sanitaires pour se conformer à cette décision. Aujourd'hui, plus de six mois après, elle ne connaît nullement le moindre début d'application (Flambeau N°458 du jeudi 12 juin 2025)
Lorsqu’en octobre 2024, le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique, Professeur Tchin Darre, fraichement nommé, imposait un code vestimentaire dans les hôpitaux publics, privés et confessionnels sur tout le territoire national, les Togolais croyaient enfin sonnée l’heure d’une harmonisation réelle des uniformes du personnel de santé dans nos structures sanitaires. Ils étaient à mille lieues d’imaginer qu’il s’agissait d’une de ces décisions mort-nées dont certaines autorités sont avides au sein de l’administration, pour des raisons qui leur sont propres. Plus de sept mois après, cette décision censée entrer en application six mois après, tend à se révéler un canular.
«Ce nouveau code vestimentaire vise à harmoniser les uniformes du personnel de santé, tout en répondant aux exigences d’hygiène et de protection», indique l’arrêté ministériel du 23 août 2024 y afférent.
Aux termes dudit arrêté, désormais, chaque catégorie socio-professionnelle aura une tenue spécifique, adaptée à sa fonction. Les médecins, chirurgiens-dentistes et pharmaciens devront porter une blouse blanche, tandis que les sage-femmes auront une tenue rose rayée. Les prestataires de soins paramédicaux, comme les techniciens de santé et anesthésistes, adopteront des ensembles de couleur verte.
Quant aux agents de rééducation, ils porteront des tenues blanches et bleues. D’autres professions, telles que les agents de la morgue ou du personnel administratif, auront également des uniformes adaptés, facilitant ainsi leur identification.
Cet arrêté tant applaudi va au-delà pour imposer également au personnel de certains services sensibles comme le bloc opératoire ou les laboratoires, le respect des standards internationaux en matière d’hygiène. Les professionnels seront par ailleurs identifiables grâce à des inscriptions sur leurs tenues, mentionnant leur nom, leur qualification et leur titre. De plus, des chaussures silencieuses, antidérapantes et fermées seront obligatoires pour tous les employés.
Afin de limiter la propagation de germes à l’extérieur des établissements, le port des tenues de travail est strictement interdit en dehors des formations sanitaires, sauf en cas de nécessité professionnelle extrahospitalière. Les formations sanitaires seront responsables de la fourniture des uniformes à leur personnel, et en cas de risques biologiques, des équipements de protection supplémentaires, comme des surblouses et des surchaussures, seront utilisés.
Une décision mort-née ?
En octobre 2024, le ministre Tchin Darre accordait un délai de six mois à tous les établissements sanitaires pour se conformer à ces nouvelles directives. «Tout manquement à ce règlement entraînera des sanctions conformément à la législation en vigueur», précise l’arrêté. Aujourd’hui, plus de six mois après, cette décision ne connait nullement le moindre début d’application.
Dans les structures sanitaires du pays, la confusion semée dans les esprits par les uniformes du personnel de santé persiste. Et les fameuses sanctions à tout manquement à ce règlement se font inlassablement attendre. Au niveau des structures publiques et privées, la priorité ne semble pas être accordée à la mesure. Conséquence, certains agents continuent de se faire passer, aux yeux des accompagnants, pour des médecins ou infirmiers qu’ils ne sont pas. Et pour cause, il n’est pas rare de retrouver ces derniers dans des tenues parfois portées par les responsables qu’ils prétendent être.
A titre d’illustration, le cas d’un « garde-malade », opérant souvent dans une section d’un grand hôpital de la place. A ce monsieur, il arrive de s’amuser à se faire passer pour un chirurgien devant des accompagnants des patients admis au bloc. Et à ce titre, il se permet, et ceci en toute impunité, des attitudes (que nous taisons par décence) que les vrais chirurgiens s’interdisent parce que complètement en porte-à-faux avec à l’éthique et la déontologie de la profession. Mais des pratiques qui lui permettent tout de même de se remplir les poches. Quel accompagnant dont le patient est hanté par le sort peut-il demeurer impassible à des propos du genre : « Ma foi, l’opération a été très compliquée. Si votre patient a la vie sauve, c’est parce que je me suis déployé à l’extrême. Mais qu’est-ce que cet effort me rapporte ? Rien ! Dans cet hôpital, vous les accompagnants, vous êtes trop pingres ! ».
D’après nos informations, beaucoup d’accompagnants se laissent tourner en bourrique par ces propos mensongers pour finalement mettre la main à la poche. Les mêmes sources affirment que des collègues de cet imposteur voire certains infirmiers assistent parfois à la scène, mais se gardent d’intervenir pour le contredire, de peur d’être «gbassé» par ce dernier qui jouirait d’une force spirituelle redoutable.
Pour éviter des dérapages du genre et autres non mentionnés dans cet article, la nécessité d’une application de cette mesure s’impose. Les autorités compétentes feraient œuvre utile en contribuant à la traduction dans les faits du contenu de cette décision.